Le Conseil de Prud’hommes de Paris résiste à son tour au barème Macron en l’écartant.

Dans un jugement du 22 novembre 2018 notifié aux parties le 1er mars 2019, le Conseil de Prud’hommes de Paris, section activités diverses a décidé de motiver sa décision fondant l’octroi des dommages et intérêts sur l’article 24 de la charte sociale européenne et l’article 10 de la convention OIT.

Par principe, le Conseil de Prud’hommes précise haut et fort et d’une manière courte mais sans ambiguïté qu’il octroie des dommages et intérêts en refusant d’appliquer le barème et en estimant une réparation adéquate due au salarié.

Pour télécharger toute la décision: JUGEMENT PARIS CPH 22 NOV 2018 BAREME

La résistance des Conseils de Prud’hommes continuent et continuera sans aucun doute malgré la tentative d’intimidation de la Ministre de la justice qui n’a pas hésité à donner des instructions aux Procureurs de la République de France et de Navarre afin que ces derniers soient présents aux audiences où il est question du plafonnement et aussi afin qu’on lui fasse remonter toutes les décisions relatives à cette question.

Cette immixtion du pouvoir exécutif dans le pouvoir judiciaire est intolérable et a été dénoncée par le SAF (syndicat des Avocats de France) qui a publié le communiqué ci-dessous:

Barème Macron des indemnités de licenciement injustifié: Panique à la Chancellerie ?

Une mesure phare des ordonnances « Macron » plafonne les indemnités que les juges peuvent accorder aux salariés pour réparer les conséquences d’un licenciement injustifié. De nombreux conseils de prud’hommes ont déjà écarté l’application de ce barème arbitraire, considérant qu’il est contraire à plusieurs conventions liant la France, aussi bien au niveau européen qu’international.

Cette « jurisprudence » s’étend et commence à inquiéter sérieusement le gouvernement. Au point que le directeur des affaires civiles et du Sceau a adressé une circulaire à tous les procureurs généraux des cours d’appel – pratique rarissime sur une question de droit du travail – pour leur demander de recenser les décisions rendues sur la question de la conformité du barème à ces conventions internationales et de prendre la parole devant les cours d’appel, lorsqu’elles seront saisies de cette question, pour tenter de sauver ce chef-d’oeuvre d’injustice en péril.

Nous nous réjouissons que la Chancellerie ait pris la mesure de la fragilité de la disposition instituant un ce barème des indemnités pour licenciement non causé.

Nous nous réjouissons aussi qu’elle entreprenne de recenser le décisions concernant cette importante question et nous ne doutons pas qu’elle donnera un large écho à toutes ces décisions quel qu’en soit le sens.

Mais nous nous étonnons du contenu orienté de la documentation diffusée, comme si la Chancellerie pouvait prendre parti sur les décisions de justice à venir.

Nous regrettons par exemple que n’ait pas été diffusée, en même temps que les décisions du Conseil d’Etat et du Conseil constitutionnel, celle du comité européen des Droits Sociaux « Finnish Society of Social Rights c. Finlande », qui a déjà désavoué un barème similaire.

Nous nous étonnons que la circulaire ne s’explique pas sur la portée plus que limitée des décisions qu’elle invoque, et n’ait pas précisé, notamment, que le Conseil Constitutionnel n’est pas juge de la conformité des lois aux conventions internationales, et que la décision du Conseil d’Etat est une décision de référé, sans autorité de chose jugée, qui ne lie en rien les juges judiciaires. Mais nous ne doutons pas que les Parquets Généraux le savent quant à eux et qu’ils pourront rappeler ces principes lorsqu’ils concluront librement sur ces affaires.

Nous tenons à leur disposition l’analyse détaillée rédigée par le SAF, ainsi que les observations qu’il a déposées devant le Comité européen des Droits sociaux, saisi d’une réclamation actuellement en cours d’instruction (n° 160/2018)

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