Article mis à jour le 10 août 2025

Les conflits familiaux peuvent parfois priver les grands-parents de tout contact avec leurs petits-enfants. Que ce soit en raison d’un divorce, d’une séparation conflictuelle, ou d’une rupture des relations, une question essentielle se pose : comment obtenir un droit de visite des grands-parents ? En tant qu’avocat intervenant en droit de la famille, je vous explique les démarches juridiques, l’article 371-4 du Code civil, et les arguments à présenter devant le juge aux affaires familiales (JAF) pour préserver ce lien essentiel.


1. Le cadre juridique : l’article 371-4 du Code civil

L’article 371-4 du Code civil est clair :

« L’enfant a le droit d’entretenir des relations personnelles avec ses ascendants. Seul l’intérêt de l’enfant peut faire obstacle à l’exercice de ce droit. »

Ce que cela signifie en pratique :

  • Le juge aux affaires familiales (JAF) ne statue pas en fonction d’un « droit des grands-parents », mais uniquement en fonction de l’intérêt supérieur de l’enfant.
  • Si le juge estime que le lien est bénéfique pour l’enfant, il fixe les modalités des relations (visites, hébergement, échanges téléphoniques, appels vidéo, etc.).
  • Ce principe s’applique aussi à d’autres tiers importants dans la vie de l’enfant (beaux-parents, anciens beaux-parents, etc.).

À noter : Même si l’article semble suggérer que l’initiative doit venir de l’enfant, la jurisprudence confirme que les grands-parents peuvent eux-mêmes saisir le juge. Dans la majorité des affaires, ce sont d’ailleurs eux qui lancent la procédure, car les parents peuvent s’opposer concrètement à ces relations. Sans dialogue, une décision judiciaire devient souvent nécessaire pour imposer le rétablissement du lien.


2. Quand le lien peut-il être refusé… ou maintenu ?

A. Les motifs graves justifiant un refus

La jurisprudence admet que le lien puisse être écarté si des motifs graves le justifient, notamment en cas de conflit aigu susceptible de perturber l’enfant. Par exemple :

  • Un arrêt de la Cour de cassation (Cass. civ. 1, 13 décembre 1989, n°87-20205) a refusé un droit de visite à des grands-parents en raison d’un conflit intense avec la mère, jugée préjudiciable pour l’enfant.
  • Dans un autre cas (Cass. civ. 1, 18 juin 2016,n°15-22.180), la Cour a cassé un arrêt accordant un droit de visite à un grand-père, car la mère avait produit un certificat médical prouvant la souffrance psychologique de ses enfants après le décès récent de leur père. Les juges n’avaient pas suffisamment motivé leur décision au regard de l’intérêt de l’enfant.

B. Le maintien du lien malgré les tensions

À l’inverse, certaines décisions confirment le maintien des relations, même dans un contexte familial difficile :

  • Cass. civ. 1, 15 février 2023, n°21-18.498 : La Cour a validé un droit de correspondance et d’accueil pour des grands-parents paternels, afin d’éviter une rupture irrémédiable avec leur lignée paternelle, malgré l’absence de relation entre la mère et ses beaux-parents.
  • Cour d’appel de Bordeaux, 6 octobre 2015 (n°14/01158) : Les juges ont estimé qu’aucun motif grave ne justifiait de priver deux enfants de leurs grands-parents paternels, malgré la distance géographique. Ils ont fixé un droit de visite progressif (un samedi par mois en point rencontre, puis un week-end par mois au domicile des grands-parents, ainsi que des vacances scolaires).
  • Un litige successoral entre la mère et les grands-parents n’est pas suffisant pour couper tout contact, surtout si des liens affectifs anciens et suivis existent (Cour d’appel de Bordeaux, 27 mai 2014, n°RG 13/05106)

3. La procédure pour maintenir ou établir le lien

A. Comment saisir le juge ?

La demande se fait par assignation, devant le Tribunal judiciaire (ex-TGI) du domicile de l’enfant. La procédure est écrite et l’avocat est obligatoire :

  • Représentation par un avocat pour saisir le juge aux affaires familiales (JAF).
  • Le Ministère public (Procureur de la République) doit être informé et donner son avis (articles 425 et 1180 du Code de procédure civile).

B. Quels éléments prouver ?

Pour convaincre le juge, il faut démontrer :

  1. L’existence (ou la possibilité de créer) de liens affectifs avec l’enfant.
  2. Le bénéfice pour l’enfant de cette relation.
  3. La capacité des grands-parents à accueillir et s’occuper de l’enfant dans de bonnes conditions.

Attention : Si les relations n’ont jamais existé et que le conflit avec les parents est particulièrement intense, obtenir un droit de visite sera plus difficile.


4. Une décision toujours prise au cas par cas

Les juges du fond sont souverains : chaque dossier est analysé en fonction de la situation familiale, du degré de tension et de l’ampleur du conflit. Aucun droit automatique n’existe pour les grands-parents, mais l’enfant a le droit de maintenir un lien avec ses ascendants si cela sert son intérêt.


En résumé

  • Les grands-parents n’ont pas de droit automatique à voir leurs petits-enfants, mais l’enfant a le droit d’entretenir des relations avec ses ascendants.
  • La clé devant le juge : prouver que le lien est dans l’intérêt de l’enfant.
  • La procédure est judiciaire, avec avocat obligatoire et intervention du Ministère public.

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