Le conseil de Prud’hommes, quelle est cette juridiction ?
Le conseil de Prud’hommes est une juridiction particulière, dédiée aux litiges entre salariés et employeurs. Les différents doivent avoir un lien avec le contrat de travail.
Ainsi le Conseil de Prud’hommes sera compétent pour apprécier si la rupture d’un contrat de travail est légitime (plus particulièrement le licenciement), il pourra ordonner la rupture du contrat de travail (résiliation judiciaire), le paiement d’heures supplémentaires pourra être sollicité, la requalification de contrats de travail à durée déterminée pourra être ordonnée, des rappels de salaires à la suite d’une modification du contrat de travail du salarié pourra être décidé (par exemple si le salarié exerçait d’autres fonctions que celles pour lesquelles il était engagé et si ces fonctions permettaient une autre classification).
Le Conseil de Prud’hommes connaîtra aussi des litiges relatif à du harcèlement moral et en relation avec l’obligation de l’employeur de préserver la santé et la sécurité du salarié.
Il ne sera pas compétent pour apprécier d’une maladie professionnelle ou d’un accident du travail, c’est le Tribunal Judiciaire Pôle social qui est compétent. Le Conseil de Prud’hommes n’est pas non plus compétent pour les litiges relatif aux fonctionnaires, ce sont les juridictions administratives qui sont compétentes.
Faut-il saisir le Conseil de Prud’hommes ou transiger ?
Il n’existe pas vraiment de choix à faire. Pour transiger, il faut être au moins deux, si vous êtes salarié, il faut que l’employeur soit d’accord pour transiger.
Il est possible de transiger avant de saisir le Conseil de Prud’hommes comme il est possible de concilier à la première audience devant le bureau de conciliation et d’orientation.
De même que l’on peut conclure un accord tout au long de la procédure avant l’audience de plaidoirie.
Les dossiers sont tous différents, il n’est donc pas possible d’affirmer qu’il faut transiger absolument avant de saisir le conseil de prud’hommes ou transiger avant d’aller au bout de la procédure.
Concilier devant le Conseil de Prud’hommes est souvent moins long et moins coûteux. Il est important d’être assisté pour être conseillé au mieux sur une proposition de conciliation ou de transaction devant le Conseil de Prud’hommes.
Sachez que si vous signez un PV de conciliation après avoir saisi le Conseil de Prud’hommes, vous bénéficiez d’avantages et notamment du bénéfice du barème de conciliation.
Comment saisir le Conseil de Prud’hommes ?
Depuis le 1er août 2016, la saisine doit s’effectuer par une requête détaillée.
Il est important de motiver la requête et de solliciter un avocat car la procédure pour saisir cette juridiction est complexe.
L’unicité d’instance a disparu, il faudra bien réfléchir au contenu de votre requête. Des demandes additionnelles ne pourront pas être ajoutées sauf si elles un lien suffisant avec les demandes initiales (article 70 du code de procédure civile). Pour un modèle de requête, vous pouvez consulter mon article: Modèle de requête de saisine du Conseil de Prud’hommes.
Pour des dossiers simples, je peux vous accompagner dans la rédaction de la requête en saisine et vous pouvez vous défendre seul, mes honoraires pour cet accompagnement sont précisés dans cet article, ils sont donnés à titre indicatif, veuillez me consulter pour avoir un devis plus précis.
Comment se passe une audience devant le bureau de conciliation et d’orientation du Conseil de Prud’hommes ?
Souvent les salariés qui engagent avec moi une procédure devant le Conseil de Prud’hommes sont inquiets, se demande comment se passera la première audience devant le bureau de conciliation et d’orientation: « Les juges vont-ils m’interroger ? », « Est-ce que je peux parler ou c’est vous qui parlez, Maître ? », « Est-ce que je suis obligé de venir, j’ai un emploi du temps chargé » (souvent une question de l’employeur). Que se passe-t-il à cette audience si nous ne concilions pas ?
- il n’est pas obligatoire de se présenter à la première audience devant le bureau de conciliation et d’orientation si vous êtes représenté par un avocat: ce dernier pourra vous représenter pour cette audience, si un accord est possible, il pourra signer le PV de conciliation. Votre avocat pourra aussi vous représenter à l’audience et recueillir les dates de mises en état dans ce dossier.
- Si vous venez, votre avocat développera à votre place les raisons de votre saisine ou les raisons pour lesquelles vous ne souhaitez pas concilier pour l’instant ou encore expliquera le contenu du PV de conciliation si vous avez abouti à un accord. Il ne sera pas forcément nécessaire de parler si votre conseil a tout exposé et le conseil de prud’hommes ne pose pas de questions
- Si vous ne conciliez pas avec votre employeur ou si vous êtes employeur et que vous ne conciliez pas avec le salarié, le conseil de prud’hommes fixera une date de mise en état généralement pour permettre au défendeur (l’employeur) de répliquer à la requête du salarié.
Qu’est ce que sont les mises en état défendeur, demandeur, devant le conseil de prud’hommes, ça dure longtemps ?
Les mises en état sont des audiences durant lesquelles le conseil de prud’hommes vérifiera que le dossier est en « état » d’être plaidé, examiné par les conseillers.
Après l’audience de conciliation, si la requête est suffisamment motivée et complète, le Conseil de Prud’hommes fixera une date de mise en état défendeur (la plupart du temps pour l’employeur) .
Cette mise en état défendeur est une date fixée pour répondre à la requête et communiquer cette réponse au conseil de prud’hommes et au demandeur (la plupart du temps au salarié).
Une fois que le défendeur a répondu, une autre date de mise en état est arrêtée afin de permettre au demandeur de répliquer à cette réplique. Les mises en état peuvent ainsi se multiplier, il arrive parfois que cette mise en état soit la course « au dernier mot ».
Aussi, la mise en état peut-être longue s’il y a beaucoup de demandes et de répliques à formuler.
Elle peut être longue aussi parce qu’il peut exister (mais c’est rare) des défendeurs qui optent pour un comportement dilatoire: « J’attends des pièces complémentaires, les conclusions sont à l’approbation du client… » Ces raisons pour ne pas déposer les conclusions sont la plupart du temps « vraies » sauf quand elles reviennent à trois mises en état d’affilées ou l’on peut, en effet, douter et s’interroger : « n’est-ce pas pour gagner du temps ? ».
Il faut rappeler que selon le Code de Procédure civile, le procès est la chose des parties.
Toutefois, les conseillers ont des moyens de procédure afin de pouvoir obliger les parties qui « abusent » de conclure.
L’ordonnance de clôture est une possibilité, elle n’est pas appliquée devant le Conseil de Prud’hommes de Bordeaux mais certains Conseil de Prud’hommes en fixent une.
L’ordonnance de clôture permet de fixer une date limite après laquelle il n’est plus possible de remettre aucune pièces ni aucune conclusions avec cet effet de contraindre les parties à se mettre en état.
La sanction est « rude », en l’absence de remise de conclusions ou pièces avant la date de clôture (et pas la veille), tous les éléments produits après cette date pourront être rejetés. Les éléments produits à la dernière minute pourront être rejetés également si l’autre partie n’a pas pu répondre, si elle n’en avait pas le temps.
A ces audiences de mises en état, il n’est pas utile de vous déplacer, il s’agit de dates « administratives » , votre dossier ne sera pas examiné à cette date.
Comment se déroule l’audience de plaidoirie devant le Conseil de Prud’hommes ?
Une fois que le dossier est prêt, qu’il y a eu de nombreuses ou pas mises en état, le dossier sera fixé pour plaider. C’est l’audience finale, celle à laquelle l’avocat conseille à son client d’y assister.
Beaucoup de dossiers sont généralement examinés le jour de l’audience de plaidoirie. Aussi, il n’est sûr que votre dossier soit examiné en début d’audience. Vous verrez une liste des dossiers à l’extérieur de la salle d’audience, ce que l’on appelle « les affiches », l’ordre de passage n’est pas l’ordre de la liste.
Nous avons des règles de passage qui existent depuis très longtemps:
-la priorité est donnée aux « extérieurs » c’est à dire aux Consœurs ou Confrères qui arrivent de loin ou qui ne sont pas de Bordeaux passent en premier. Ainsi, si des Confrères de Paris, Libourne ou Périgueux sont à l’audience et souhaitent plaider leur dossier, ils passeront avant votre avocat et l’avantage, si votre avocat plaide contre un Confrère « extérieur », votre dossier passera dans les premiers aussi selon la distance, vaut mieux avoir un parisien comme adversaire qu’un libournais.
-puis (ce n’est pas fini), après la priorité des extérieurs, il y a la priorité aux anciens, au Bâtonnier en exercice, aux femmes enceintes (priorité qui est inscrite dans le Règlement Intérieur du Barreau de Bordeaux, qui a dû être inscrite car j’ai assisté à des comportements peu élégants de certains Confrères ou Consœurs sur cette priorité incomprise). Plus votre avocat est ancien dans la profession, plus vous passerez tôt et si votre adverse est très ancien, vous aurez également la chance de profiter de cette priorité.
Lorsque votre dossier est appelé, il y a une place dédiée au demandeur et une autre au défendeur (à Bordeaux, à droite toute pour le demandeur et à gauche pour le défendeur). Selon les salles, vous pouvez vous asseoir derrière ou à côté de votre avocat.
L’avocat du demandeur (le salarié majoritairement), plaide en premier, un temps a été souvent donné au début de l’audience car la justice est débordée et n’a malheureusement plus le temps d’écouter, de prendre le temps pour les justiciables, c’est un triste constat. Je vous invite à lire mon article sur ce sujet: » Justice malade: Votre avocat chanterait la marseillaise que ça reviendrait au même ! »
Durant la plaidoirie de votre avocat, il n’est pas permis pour vous d’intervenir comme pour la partie adverse.
Si vous avez quelque chose à ajouter que votre avocat n’aura pas évoqué, il faudra lui indiquer pour qu’il sollicite du Conseil de Prud’hommes de vous donner la parole.
Il faudra alors vous lever pour prendre la parole, il ne sert à rien de répéter ce qui a déjà été dit par votre avocat, c’est pour cela qu’avant de prendre la parole, demandez à votre avocat s’il vous conseille de la prendre.
Une fois que l’avocat du demandeur a plaidé, c’est au tour de l’avocat du défendeur (majoritairement l’employeur) , souvent le salarié qui entend cette plaidoirie peste, s’agace des « mensonges » qui sont dit, il est frustré car il ne peut pas intervenir et parce que l’employeur aura le dernier mot, il n’est pas possible de plaider une deuxième fois après la plaidoirie du défendeur.
Il faut se préparer à cette frustration et surtout savoir que ce n’est pas « le dernier qui a parlé qui aura raison ».
Après les plaidoiries, s’il n’y a pas de questions des conseillers prud’hommes, des dossiers de plaidoirie sont remis au Conseil de Prud’hommes qui les examinera avec toutes les pièces et les éléments au soutien des arguments de chaque parties. Aussi, si oralement des inexactitudes ont été développées ou « des mensonges » (attention notre déontologie nous interdit d’inventer des pièces ou de développer des arguments non développés dans nos écritures- c’est contraire par ailleurs au principe du contradictoire d’ajouter des arguments-), les conseillers s’en rendront compte très vite et apprécieront moyennement.
L’affaire est alors mise en délibéré, une date de rendu de la décision est donnée, généralement 2 à 3 mois après cette audience.
Vous n’aurez pas connaissance de la décision après les plaidoiries, le Conseil de Prud’hommes se laisse le temps d’examiner les pièces du dossier et de parler ensemble de ce dernier, rappelons que la juridiction est paritaire composées de 4 conseillers, deux « employeurs », deux « salariés », la discussion doit avoir lieu entre eux.
Il arrive qu’à la date donnée la décision ne soit pas communiquée, on dit que le délibéré a été prorogé, les conseillers ont besoin de plus de temps pour rendre leur décision.
Cela arrive de plus en plus souvent, encore une fois parce que la juridiction est débordée.
Sachez que généralement, votre avocat reçoit la décision quelques jours avant vous, vous la recevrez par lettre recommandée avec avis de réception.
C’est de cette manière que les jugements du Conseil de Prud’hommes sont notifiés.
Attention, la date de réception de votre recommandé fait débuter le délai pour interjeter appel du jugement, ce délai est d’un mois.
Si vous réceptionnez par exemple le jugement le 5 septembre, vous aurez jusqu’au 5 octobre pour interjeter appel.
Votre avocat vous adressera un compte rendu détaillé de la décision et vous conseillera sur l’opportunité d’interjeter appel.
Pour ma part, je propose un rendez-vous téléphonique après l’envoi du jugement pour l’expliquer et conseiller mes clients.
Sachez que le jugement peut ne pas être rendu tout de suite si les conseillers prud’hommes n’ont pas réussi à se mettre « d’accord », si les conseillers « salariés » estiment que le salarié a raison et si les conseillers « employeurs » estiment que c’est l’employeur qui a raison. Dans cette hypothèse, l’affaire est renvoyée devant un juge départiteur, chargé de les départager.
Le délai de renvoi vers ce juge s’est considérablement raccourci depuis les actions que nous avons menées pour engager la responsabilité de l’Etat pour lenteurs de la justice (voir l’article: Lenteur de la justice : l’État condamné à verser près de 80 000 € aux justiciables)
Ce délai, à Bordeaux est au maximum de 2 mois, après l’audience de plaidoirie.
Le dossier sera plaidé une deuxième fois devant le juge départiteur.