La loi sur la gestion de la crise sanitaire a été adoptée par l’Assemblée nationale et doit être examinée par le Conseil constitutionnel, la décision est attendue et doit être rendue demain, jeudi 5 août 2021 en début de soirée.

Le passe sanitaire en entreprise pose de nombreuses questions, comme je l’ai déjà écrit.

Le SAF avec d’autres syndicats (la CGT et FSU et solidaires) a déposé une contribution extérieure, porte « étroite » sur laquelle il convient de s’attarder.

– En introduction, les syndicats considèrent que le gouvernement aurait pu mettre en place d’autres mesures que celles prévues par la loi, qui sont disproportionnées, en s’appuyant sur les organisations syndicales qui n’ont été informées que par visio le 16/07.
Il est déploré la mise en place de pratiques de surveillance sociale effectuées par les employeurs. Les salariés sont livrés à l’arbitraire. Anormal que les employeurs puissent exiger des salariés leur état de santé, ce contrôle a toujours été réservé aux médecins du travail.

– Des irrégularités procédurales préalables au projet de loi sont soulevées (étude d’impact incomplète transmise tardivement au parlement, parlementaires contraint de l’adopter en 1 semaine, pb de clarté et sincérité des débats)

-L’imprécision de la loi est soulignée, « il est impossible de savoir précisément quel travailleur sera soumis à l’obligation de présenter un passe sanitaire (..) » ‘L’inintelligibilité de cette disposition crée un risque d’arbitraire important »

.Les atteintes aux principes constitutionnels en lien avec le travail droit emploi, liberté contractuelle et droit à la santé

-l’obligation du passe sanitaire peut entraîner des dérives, un employeur pourrait faire de la détention du passe sanitaire un critère de recrutement.

Contraire au préambule de la constitution du 27 octobre 1946 qui affirme le droit pour chacun d’obtenir un emploi :

“Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi”

-les travailleurs concernés par l’obligation de présenter un “passe sanitaire” ne sont pas clairement définis

-les sanctions pour le salarié sans passe sanitaire portent une atteinte excessive au droit à l’emploi ne sont absolument pas proportionnées à l’objectif poursuivi par le législateur (rupture anticipée CDD, suspension sans rémunération du contrat de travail)

# Pour les CDI la suspension du contrat de travail n’est pas limité dans le temps, obligation de convocation de l’employeur de convoquer le salarié dans les trois jours de la suspension ne lui interdit pas de faire durer la suspension.

Le fait d’interrompre le versement de la rémunération des salariés dont le contrat est suspendu ne répond absolument pas à l’objectif voulu par le législateur, pourquoi ne pas avoir mis en place un mécanisme d’activité partielle ou encore arrêt de travail dérogatoire ?
Au surplus, il est plus que probable que les employeurs utiliseront cette possibilité de suspension du contrat de travail pour contraindre les salariés à la démission.

# Pour les CDD, la rupture anticipée est une sanction qui n’est pas justifiée par l’objectif sanitaire poursuivi, et qui est manifestement disproportionnée au regard des conséquences graves que cela peut avoir sur le salarié déjà précaire qui perd son emploi.

.Modifications unilatérales du contrat de travail, avec l’introduction de la suspension du contrat de travail pour le salarié sans passe sanitaire et la possibilité de modifier unilatéralement le poste du salarié pour l’affecter à un poste non soumis à l’obligation du passe
Les travailleurs qui devront contrôler le passe sanitaire verront aussi leur contrat modifié.
Ce projet de loi ignore le principe constitutionnel de liberté contractuelle.

.droit à la santé: Si les débats se sont concentrés sur les travailleurs qui ne seraient pas en mesure de présenter le “passe sanitaire”, il ne faut pas oublier les conséquences de cette loi sur les salariésdétenteurs de ce passe

.Les atteintes au principe constitutionnel d’égalité et à l’interdiction des discriminations

-Discrimination en raison de l’état de santé des travailleurs (…) l’objectif constitutionnel de protection de la santé ne saurait justifier. Une telle discrimination directe manifestement disproportionnée compte tenu des conséquences extrêmement graves de ces mesures pour les travailleurs

-Rupture d’égalité dans l’accès à la vaccination et aux tests virologiques. Compte tenu des délais de mise en œuvre des obligations fixés, il est impossible que toute la population concernée puisse bénéficier des
doses vaccinales prescrites.

-Rupture d’égalité des salariés selon leur type de contrat (CDD /CDI) l’objectif visé par le législateur de protection de la santé ne justifie pas, que là où il a justement été décidé que la non-présentation du “passe sanitaire”ne pouvait être un motif autonome de licenciement pour le salarié en CDI, le défaut de “passe sanitaire” soit pour le salarié en CDD ou en intérim un motif de rupture anticipée du contrat

.Les atteintes au droit au respect de la vie privée et au droit à la protection sociale (Modification du contrat de travail en raison d’un motif tiré de la vie privée du salarié, atteinte au droit à des moyens convenables d’existence et à la protection de la sécurité matérielle ainsi qu’au droit à la protection sociale constitutionnellement protégés)

Vous pouvez lire l’intégralité de la contribution sur le site du SAF: Contribution extérieure SAF sur la loi sur la gestion de la crise sanitaire (droit du travail)

A lire aussi:

– Marianne: Passe sanitaire et libertés: s’il est validé, il risque de s’installer dans le paysage.
-Le Figaro: Passe sanitaire: les enjeux devant le conseil constitutionnel

France Inter: Projet de loi sanitaire: « Un fort risque d’inconstitutionnalité » selon Dominique Rousseau

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