L’avis de la Cour de cassation était attendu.
Le décret dit Macron a mis en place la procédure écrite devant les Chambres sociales de la Cour d’appel qui sont désormais soumise au décret Magendie et surtout à des délais très stricts: voir sur ce point mon article, Une vraie révolution devant les Cours d’appel Chambres sociales.
Par ailleurs, il n’est plus possible pour le justiciable de se présenter seul devant les Cours d’appel, Chambres sociales, la représentation est obligatoire et donc il est nécessaire pour l’appelant et l’intimé de se faire assister par un avocat.
Il se posait une question particulière qui ne trouvait pas sa réponse dans ce décret: l’avocat qui n’est pas du ressort de la Cour d’appel auprès de laquelle il interjette appel a-t-il besoin de ce que l’on appelle dans notre jargon d’un postulant ? En plus simple, est-ce que tout avocat quelque soit son barreau peut représenter et plaider devant toute juridiction d’appel. Un avocat du Barreau de Bordeaux, peut-il représenter un de ses clients salarié ou employeur à Paris, Marseille ou encore Limoges ?
Une circulaire a été diffusée qui n’a que la valeur d’une circulaire et qui était loin d’être claire (circulaire du 27 juillet 2016).
Les Cours d’appel étaient divisées sur cette question:
-pour certaines, pas besoin de postulant ( Cour d’appel d’Aix en Provence 27 février 2017 16/20624 )
-pour d’autres le postulant était nécessaire ( Ordonnance d’irrecevabilité d’appel JME de la CA de Montpellier du 10/11/2016)
La prudence était de mise, il était sage de demander à un Confrère de se constituer et de postuler lorsque l’on souhaitait assister et représenter un client hors de notre territoire (de la Cour d’appel de notre ressort).
Pour être éclairé, dans le cadre d’un litige devant la Cour d’appel de Versailles, une demande d’avis a été déposée par des avocats auprès de la Cour de cassation.
Cet avis a été rendu aujourd’hui, le 5 Mai 2017. (sur la procédure d’avis de la Cour de cassation, relire Me EOLAS: » (…)Elle vise à faire trancher les questions d’interprétation du droit dès le début du litige. Elle permet à un juge saisi d’un litige où se pose une question de droit nouvelle, après avoir sollicité la position des parties, de poser la question en termes strictement juridiques, à la cour de cassation, qui répond par un avis sur le sens de la loi. La cour veille scrupuleusement à cette condition de nouveauté (faute de quoi elle dit n’y avoir lieu à avis). L’avis est instruit comme un pourvoi, avec un rapport et des conclusions d’un avocat général près la cour de cassation, et est rendu dans les trois mois, délai qui a toujours été respecté. Le procès reprend son cours, avec un point essentiel tranché avec une autorité certaine, qui pourra décourager le perdant de s’engager dans un recours inutile. »).
Le SAF (Syndicat des Avocats de France) était intervenant volontaire à la procédure, un communiqué a été publié aujourd’hui (http://lesaf.org/communique-pas-de-postulation-devant-la-cour-dappel-en-matiere-sociale/).
La Cour de cassation dans son avis du 5 Mai 2017 indique:
« (…) Il s’ensuit que l’application des dispositions du code de procédure civile relatives à la représentation obligatoire devant la cour d’appel statuant en matière prud’homale n’implique pas la mise en oeuvre des règles de la postulation devant les cours d’appel, les parties pouvant être représentées par tout avocat, si elles ne font pas le choix d’un défenseur syndical. (…) »
Qu’est-ce que dit l’avis de la Cour de cassation du 5 Mai 2017 sur la représentation obligatoire devant les Cours d’appel, Chambres sociales ?
La Cour de cassation par cet avis indique aux Cours d’appels que les règles de territorialité ne s’appliquent pas devant les Cours d’appels, Chambres sociales.
Quelles sont les difficultés qui subsistent après l’avis de la Cour de cassation du 5 Mai 2017 sur la représentation obligatoire devant les Cours d’appel, Chambres sociales ( et la question du timbre fiscal notamment) ?
La principale difficulté est l’accès au Réseau privé virtuel des avocats, de tous les avocats pour toutes les Cours d’appels.
En effet, nous communiquons électroniquement avec la Cour d’appel grâce à ce réseau et le Code de Procédure civile obligent les avocats à interjeter appel par la voie électronique.
Notre accès aux RPVA des Cours d’appels autres que celles du ressort de laquelle nous dépendons est limité voire inexistant.
Aussi, dans la pratique, cet avis ne change rien bien malheureusement, la prudence sera encore et de plus fort de mise, car nous ne savons pas si l’appel par lettre recommandée AR sera accepté par la juridiction.
Pouvons-nous invoquer l’article 930-1 du Code de Procédure Civile ? ( il dispose: « Lorsqu’un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l’accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe. En ce cas, la déclaration d’appel est remise au greffe en autant d’exemplaires qu’il y a de parties destinataires, plus deux. La remise est constatée par la mention de sa date et le visa du greffier sur chaque exemplaire, dont l’un est immédiatement restitué. »)
Si nous déposons notre déclaration au greffe, nous devons la déposer en personne et donc nous déplacer jusqu’au greffe d’une juridiction lointaine, ce qui n’est guère pratique.
Wait and see… attendons que le RPVA soit étendu, il devait l’être en théorie, en pratique on attend toujours et encore, une spécialité des avocats: attente devant les salles d’audience, attente des sorties de décret, attentes, attentes…
UN CONSEIL: pour l’instant continuez à prendre un postulant jusqu’à ce que cette question du RPVA soit réglée. Pour ma part, c’est ce que je vais continuer à faire.